Le silence des agneaux

Benoit Rayski s'inquiète du silence des Ulis. Habitant la ville depuis plus de dix ans, je tiens à le rassurer : le dernier mois a été particulièrement bruyant, comme en témoignent les derniers billets de ce blog. La ville des Ulis est sortie de terre dans les années 70. La plupart des habitants viennent d'ailleurs, et retournent dans cet ailleurs pendant les vacances, ce qui fait que la ville en juillet-août est plutôt vide. La semaine dernière, par exemple, j'admirais le Belem à Nantes, tout en suivant l'actualité de la villle. Je n'en ai pas parlé sur ce blog d'événements auxquels je n'ai pas assisté. En revanche, le Parisien, BFM ou le Républicain ont publié des articles. Il n'y a pas qu'Atlantico !



Fiesta

Le mois de juin est traditionnellement celui des fêtes de quartier, des écoles, et des associations. Début juillet, il y a eu le festival Alternatiba, avec batucada, concert... Pour ne pas stigmatiser les écolos, et jouer les bisounours, je dois reconnaître qu'il y a quelques nuisances sonores qui empêchent de dormir la fenêtre ouverte en cas de canicule. Ça peut être les rires des enfants après le repas de rupture du jeûne du ramadan. Mais cela est sans commune mesure avec la fête des enseignants qui ont vociféré du Dalida, Gilbert Montagné ou Claude François jusqu'à 3 heures du matin lors du dernier jour d'école. 

Omerta

Oui, les habitants discutent entre eux, mais il est faut de parler d'omerta. Beaucoup d'informations passent par les réseaux sociaux. Par exemple. Le groupe "tu sais que tu viens des Ulis quand..." compte plus de 5000 abonnés, soit plus d1/5ème de la population de la ville. Il est ouvert, c'est-à-dire qu'à n'importe quel utilisateur de Facebook peut voir ce qui s'y dit sans y être abonné.

Le 7 juillet, en attendant le bus, j'ai pris cette photo. Aurais-je dû la publier sur ce blog ? Pour moi, elle n'était pas représentative des Ulis à ce moment là. 



Depuis que je suis aux Ulis, j'ai toujours entendu des pétards autour du 14 juillet, mais jusqu'à présent, c'était plutôt des claques-doigts. Cette année, les détonations ont été plus fortes, plus nombreuses. On a parlé de tirs de mortier. Comment se les procurer ? Sur internet, pour 18 euros les 6. A priori, il faut un permis et être majeur, mais quand on a de l'argent, tout est possible.

Hier vers 13h, j'ai photographié la même rue. Cette photo est aussi révélatrice du calme des Ulis pendant la journée.


Que fait le gouvernement ?

Mais reprenons le texte d'Atlantico. Benoit Rayski a raison de s'étonner du silence du gouvernement, mais ce n'est pas à monsieur Cazeneuve de venir. Mesdames Belkacem et Taubira connaissent assez bien les Ulis, où elles sont venues soutenir les candidats PS lors de la dernière élection.


Education

Le plus gros problème concerne l'éducation. Certains "jeunes" ont justifié les violences contre le commissariat par la Marseillaise entendu lors du feu d'artifice le 13 juillet. On a pu entendre "c'est la preuve que la mairie est de droite". Nous fûmes plusieurs de gauche ou pas, à dire et redire, que la Marseillaise était l'hymne national et non celui du parti de monsieur Sarkozy. Ce sont les mêmes paroles que celles chantées par Thierry Henry ou Patrice Evra lorsqu'ils portent le maillot tricolore. La Marseillaise n'est ni de droite, ni de gauche.

Toujours au chapitre éducation, les parents ulissiens baisseraient les bras, seraient dépassés par leurs ados. Comment est-ce possible que des jeunes de 14 à 19 ans soient dehors à 1h du matin ? Selon Olivier Revol, éduquer, c'est ex-ducare, mener au-dehors. L'histoire de Tarik Malki le montre bien, s'il était dehors, c'est qu'il sortait du bar, après la prière à la mosquée. On peut imaginer que si les ados sont dehors à une telle heure, ce n'est pas de la "faute" des parents, mais c'est dû à leur pratique religieuse pendant le mois du ramadan. Je n'ai aucun doute que ce ne sont pas les imams, pas plus que les parents qui invitent les "jeunes" à s'en prendre à un commissariat ou à ne pas rentrer chez eux après la prière. Si le silence des parents ou des représentants religieux est éventuellement condamnable, il y a d'autres responsables, à commencer par les adolescents eux-mêmes. A 14 ans, ils sont pénalement responsables.

La ville des Ulis compte deux collèges : Aimé Césaire et Mondétour. Comme de nombreux établissements similaires, la difficulté pour les enseignants est d'avoir des classes hétérogènes, avec de très bons élèves et d'autres qui ont d'importantes difficultés. Dans le cadre de la réforme du collège, ces enfants pourraient entendre parler de l'esclavage (enseignement obligatoire) sans entendre parler de Montesquieu et des philosophes des lumières (enseignement facultatif) qui ont condamné cet esclavage et ont montré ce que l'intelligence et la réflexion pouvait produire de meilleur.

Justice

Aujourd'hui, ce que demandent les Ulissiens, c'est avant tout la justice, condition nécessaire au retour du calme. Justice pour Tarik Malik, victime des affrontements entre policiers et jeunes pendant cette nuit du destin. Des deux côtés, il faut que la lumière soit faite !



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